Ce récent article publié par Fred Cavazza passe en revue les différentes plateformes sociales fréquentées par un jeune de 19 ans. Dans son témoignage, voici quelques impressions que je retiens :
Facebook est, selon lui, une plateforme sociale « morte pour les ados ».
Instagram est de loin la plateforme sociale la plus populaire.
Twitter est considéré comme une énigme, la plupart des jeunes n’y voient qu’un intérêt limité.
Snapchat est en train de devenir la plateforme la plus populaire.
Yik Yak est l’application mobile qui monte.
Medium est présentée comme la plateforme de publication de référence.
GroupMe est l’application de messagerie de groupe la plus populaire, d’autant plus depuis que les GIF animés sont pris en charge.
Bien qu’il ne s’agisse pas d’une étude, mais de l’opinion d’un seul adolescent, on y trouve des aspects cohérents avec d’autres analyses. Pour des explications plus détaillées, je vous invite à lire l’article, mais retenons simplement qu’adultes et adolescents ne partagent pas, ou ne partagent plus, les mêmes plateformes essentiellement parce qu’ils ne communiquent pas de la même manière.
Comme le mentionne Thu Trinh-Bouvier dans une entrevue accordée au journal Le Monde, les jeunes s’expriment dorénavant visuellement avec des émoticônes qui symbolisent leurs émotions, des photos, des vidéos très courtes, ou encore des GIF. Nous vivons dans une ère d’instantanéité largement facilitée par l’adoption massive du téléphone cellulaire. «Le smartphone, dont ils sont massivement équipés, est devenu pour eux l’équivalent du stylo.»
L’image conversationnelle
Selon Thu Trinh-Bouvier, le réseau social Instagram permet aux jeunes de se mettre en valeur à travers ces fameux égoportraits retouchés à l’aide de filtres. Elle mentionne que c’est le lieu des déclarations d’amitié et d’amour. Ensuite, il ne faut pas négliger l’importance des émoticônes toujours plus variées les unes que les autres. « Ces petits dessins fournissent une clé de lecture du message, ils l’enveloppent, lui donnent de l’affect. Un SMS sans émoticône est perçu comme violent, comme s’il y avait une tension, que la personne était contrariée. Si jamais, en plus, il y a un point à la fin de la phrase, c’est que le problème est grave! »
Quand j’étais jeune, je passais des heures au téléphone avec les camarades de classe avec lesquels je venais de passer la journée. Rien n’a véritablement changé, sinon que le rapport aux autres ne s’inscrit plus dans le son, mais dans l’image. Thu Trinh-Bouvier explique que l’image sert, d’une part, à entretenir le lien et, d’autre part, à susciter une réaction. Cela dit, contrairement à mes interminables conversations d’adolescente, les échanges des jeunes d’aujourd’hui laissent aussi des traces qui prennent la forme de souvenirs, mais aussi d’outil d’intimidation dans le pire des cas.
La domination de Snapchat
Thu Trinh-Bouvier qualifie Snapchat de temple pour les jeunes, « celui de la culture LOL ». Encore ce matin, Fred Cavazza confirmait la domination de Snapchat dans les échanges entre jeunes : « Pour simplifier : les ados l’adorent, car les adultes n’y comprennent rien. »
L’étude Global Web Index signale aussi que Snapchat est l’application dont l’auditoire a grandi le plus vite en 2014, avec une croissance de 57 % en une seule année. C’est 15 % des adolescents de la planète qui l’utilisent, avec des pointes en Angleterre et en Suède, où près de 40 % des jeunes en sont des adeptes. Au Canada, on compte 26 % des adolescents qui utilisent Snapchat. C’est notamment ce qui lui permet d’offrir des tarifs publicitaires prohibitifs, comme le souligne cet article qui parle d’un montant de 750 000 $ par jour.
Se distinguer des adultes
Les plateformes comme Snapchat permettent aux jeunes de créer un espace de liberté, qui remplit une importance fonction sociale, de surcroît.
Ce pic speech, ou « parlimage » permet aux jeunes de se créer une culture qui échappe au contrôle des adultes et qui renforce leur sentiment d’appartenance à un groupe. Plusieurs études avaient déjà fait le constat avec les messages texte, ce langage que certains considèrent comme opaque. Les adolescents d’aujourd’hui ont trouvé une nouvelle façon de consolider leurs rapports entre eux, à l’abri du regard des adultes. C’est en partie ce qui expliquerait, toujours selon Thu Trinh-Bouvier, que les jeunes mettent peu de photos sur Facebook, ou alors qu’ils les concentrent dans des groupes.
Ça vaut la peine d’aller jeter un oeil sur Snapchat, ne serait-ce que pour comprendre l’engouement des jeunes pour ce langage de l’image.
En savoir +
http://blogues.radio-canada.ca/triplex/2015/03/11/catherine-mathys-44/
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